Braises de Guerre

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6 minutes

Par Gareth L. Powell

Il m’arrive d’apprécier un livre sans savoir exactement pourquoi. J’aborde donc cette chronique avec un peu d’inquiétude, sachant qu’au fond j’ai peu d’arguments objectifs à faire valoir pour encenser “Braises de guerre” ! Ce n’est peut-être pas un ouvrage révolutionnaire mais ce space-opéra décomplexé, jouissif et accessible m’a tout de même fait passer un vrai bon moment. Peut-être parce que je n’en attendais pas grand-chose, l’ayant choisi un peu par hasard, sans avoir lu de critiques ou de recommandations élogieuses pour me guider.

Mais, bon voilà : donnez-moi une histoire dont l’un des principaux personnages est un vaisseau pensant et un brin revêche, et pouf, je suis tout content !

Un vaisseau et son équipage “tout cassés”

Le Chien à problèmes est une vétérane de la Guerre de l’Archipel, un conflit ayant opposé deux factions l’humanité. Elle est un ancien vaisseau militaire, ayant appartenu au camp victorieux, et dont les entrailles abritent, entre autres, un cerveau tout autant cybernétique qu’organique, avec des bouts d’ADN humains et canins. Revêche ? Comme elle le dit d’elle-même, elle est “une adolescente de quatorze ans sous l’apparence d’un missile”. Et ce n’est pas peu dire que la guerre, elle ne veut plus en entendre parler ! Ja-mais ! Elle a donc démissionné et rejoint la Maison de la Récupération, une sorte d’ONG inter-espèces dévolue au sauvetage de tous les naviguant de l’espace, peu importe leurs origines et peu importe les dangers.

À son bord, Sol Konstanz, faisant office de commandante de bord, et Alva Klay, chargée de jouer aux gros bras(*), toutes deux également vétéranes de cette guerre, et qui tentent elles aussi d’oublier les horreurs qu’elles ont traversées, en s’investissant à corps et à cœurs perdus dans leur mission quasi-sacrée ! Car dans ce futur pas si lointain, rejoindre la Maison de la Récupération c’est faire sien un idéal que les humains ou les aliens ne partagent pas forcément : tout sacrifier pour venir en aide aux autres, même au péril de leur vie. Et puisque l’auteur a décidé de nous livrer un récit d’aventures, mené tambour battant, la périlleuse mission de sauvetage que l’équipage se voit assigné démarre après à peine quelques chapitres de mise en place ! Un vaisseau de croisière, avec neuf cent personnes à bord, s’est en effet fait bombarder dans une région pour le moins dangereuses de l’espace…

(*) Aucune difficulté pour rapprocher cette dernière du personnage de Vasquez dans Aliens !

Contexte : point trop n’en faut !

Une fois n’est pas coutume je vais livrer une chronique cette fois découpée par thématique(*), avec pour commencer un descriptif et une appréciation du contexte et du décor général de l’intrigue.

(*) Pour donner l’illusion de faire sérieux et argumenté.

Un contexte général que Gareth L. Powell s’ingénie à nous livrer par petites touches, et avec lequel il évite de faire sombrer le lecteur dans l’ennui ! On apprendra ainsi que l’humanité a réussi à conquérir les étoiles contre toute attente grâce à de très sympathiques aliens ayant découvert ce qu’il restait de notre civilisation, au bord de l’extinction. Lesquels aliens nous ont offert en prime la science permettant à l’Humanité de rejoindre le concert des civilisations interstellaires, La Multiplicité. Laquelle, tant pis pour les révélations, n’est qu’à peine esquissée : on en sait juste assez pour savoir que des aliens existent, sont très avancés et qu’ils ne sont pas tous sympathiques.

Et puisque j’ai utilisé en introduction le terme de décor, disons, à ce propos, que le livre n’a pas pour ambition de nous faire visiter les coins les plus pittoresques de la galaxie : pas d’envolées lyriques sur des environnements “exotiques et foisonnants” et pas de découvertes d’exoplanètes fofolles non plus ! Et c’est par ailleurs un point qui ne m’a pas gêné du tout.

Narration et style : au top !

Dans sa postface, l’auteur remercie Emma Newman(*) pour lui avoir insufflé l’audace d’écrire un roman à la première personne. Et bien moi aussi du coup ! Parce que c’est sans doute ce qui m’a permis d’embarquer facilement dans cette histoire et d’en apprécier les personnages, Le Chien à problèmes en tête, bien sûr ! Chaque chapitre a ainsi son narrateur, qui donne en plus au lecteur son point de vue sur les événements et les autres personnages de l’histoire. L’alternance des narrateurs permet ainsi à l’auteur d’inclure d’autres personnages, tel Ashton Shilde, un agent secret bien peu efficace ayant décidé de rallier l’équipage, ou Ona Sudak, l’une des passagères en attente de la mission de sauvetage, et sans oublier également Nod, un “Druff”, unique protagoniste alien du livre, mécanicien de bord du Chien à problèmes, et dont la manière de s’exprimer est des plus… lunaires ?

(*) Autrice d’une trilogie, dont les deux premiers tomes seulement ont été traduits, et dont le premier, “Planetfall”, est un tour de force stylistique du même genre, mais avec un seul narrateur.

Au final…

Facile à lire, marrant et, à mon goût, passionnant à suivre, je ne suis visiblement pas le seul à être tombé sous le charme de cet ouvrage, puisque il y a désormais deux suites à ce livre et qu’elles ont été traduites ! On pourra m’objecter que l’histoire est un peu classique, que le dénouement n’est pas des plus inattendus voire même qu’au niveau “wow” on a vu plus innovant, il n’en reste pas moins que “Braises de guerre” m’a fait sourire et ricaner bien des fois. Et qu’il m’a distrait sans jamais m’ennuyer ni me perdre sur près de 450 pages. Alors ? L’idée d’un vaisseau pensant avec un nom à coucher dehors n’est pas neuve ? Mettre en scène une équipe de bras-cassés que l’adversité transforme en héros du jour, c’est du déjà-vu ? Oui, mais quand c’est bien fait, quand l’auteur n’essaye pas de te faire la morale, quand les concepts science-fictionnels s’effacent derrière l’histoire, ben il n’y a qu’une chose à dire, c’est que c’est une bonne histoire !


Fiche JKB

  • Genre : Space-opera jouissif pour rebelles idéalistes !
  • Wow Level : 7/10. Pour le style plus que pour l’originalité des concepts.
  • Note personnelle : 8/10. Y’a douze scénaristes de Star Wars qui ont pas fait mieux en plus de huit films et je ne sais combien de séries ! Lisez ce livre !
  • Près de 450 pages, qui passent vite. Je l’ai même fait un peu trainé, histoire de faire durer le plaisir.
  • Probabilité de relecture : Plus de 50%.
  • Fiche sur Noosfere, avec une critique reprise de Bifrost, signée Éric Jentile (qui n’a trop pas aimé)
  • Critique sur Le Culte d’Apophis
  • British Science Fiction Award, 2018

Titre original :

Embers of War

2018

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