La science-fiction, ça se passe souvent sur de lointaines planètes et dans un futur lointain aussi, sans pour autant que ce soit totalement dépaysant et étrange, mais au contraire curieusement familier ! C’est bien le cas avec “Les Joyaux de la Couronne”, qui transporte le lecteur quelques siècles dans le futur, sur la planète Peleng, là où se côtoient les partisans de l’Empire et leurs opposants, et qui est bien entendu devenu le théâtre feutré d’intrigues politiques alambiquées. Des intrigues qui vont se retrouver bousculées par l’arrivée, en fanfare, de Drake Majistral, le cambrioleur connu pour fréquenter la haute société galactique, dont il dévalise régulièrement les membres les plus en vue.
Walter Jon Williams, connu surtout pour ses romans cyberpunk, “Câblé” et “Le souffle du cyclone”, nous livre ici une farce dans un décor science-fictionnel qui sert de prétexte à des situations hilarantes et à une intrigue politique empruntant ses ressorts au théâtre de vaudeville. Avec son héros rappelant sans peine Arsène Lupin, ses rebondissements aussi inattendus que jouissifs, et sa galerie de personnages saugrenus, ce roman m’a franchement fait pouffer(*), voire éclater de rire à plusieurs reprises.
(*) Oui, “pouffer” ! Pardonnez-moi, manants, mais j’ai bien le droit de châtier mon langage si je veux !
L’Empire Khosavi
Il sera donc question ici de cambriolage audacieux et de machinations politiques ! Et puisque c’est le décor de cette histoire, parlons un peu des Khosavis et de leur empire stellaire. Dans ce futur imaginé par Williams, ce ne sont pas les humains qui règnent sur la galaxie, mais ces aliens anthropomorphes, au museau et au pelage qui ne sont pas sans évoquer le “meilleur ami de l’homme”. Quand ils sourient, ils ont la langue qui pend et ils expriment certaines de leurs émotions en rabattant ou en redressant leurs oreilles, qu’ils ont pointues. Oui, des loups-garous si vous voulez, mais éduqués (*), polis et très respectueux des conventions.
(*) Ce qui ne signifie pas qu’ils sont tous super intelligents, hein !? Et d’ailleurs on en reparle plus bas.
Depuis des millénaires, ils ont conquis et asservi toutes les civilisations qu’ils ont croisées, avec une facilité que seule confère l’habitude du succès. Ce fut d’ailleurs le cas avec les humains il y a quelques siècles, qui, après une conquête plutôt pacifique, ont intégré l’Empire autant que l’Empire les a intégrés, comme c’est d’ailleurs le cas quand la colonisation se passe bien. En effet, les Khosavis, étant un peuple éduqué comme je le précisais, préfèrent asseoir leur pouvoir, non par la force et l’oppression, mais plutôt en imposant leur culture à ceux qu’ils ont conquis. Ce qui a plutôt bien marché pendant des siècles. Du coup, les humains aussi ont pris l’habitude de laisser pendre leurs langues quand ils sourient !
Un casse ingénieux, mais…
À l’occasion d’une révolte(*), une partie de l’humanité a toutefois réussi à échapper à ses maîtres. Et désormais, entre l’empire et les planètes humaines sécessionnistes, c’est la guerre froide et polie, mais dans le respect de l’étiquette, tout de même ! Et sur Peleng, ce conflit larvé, mené à coup d’entourloupes et de tromperies, semble se polariser autour d’un mystérieux objet attirant fortement la convoitise des deux parties. L’arrivée de Drake Majistral sur cette planète se présente alors comme une aubaine pour la Constellation, le parti humain, qui verrait bien le fameux Cambrioleur patenté ravir cet objet pour eux ‚au nez et à la barbe des Impérialistes.
(*) Une première pour l’Empire Khosavi : jusqu’ici, personne n’avait même osé y penser !
On va le dire, comme souvent dans le cas d’un polar racontant un casse, la réussite du cambriolage est une formalité, ou presque. En fait, c’est toujours une fois le butin en main que les choses se gâtent… et pour Drake, les vraies difficultés vont commencer quand les Impérialistes vont vouloir kidnapper la commanditaire du vol de façon à récupérer cet objet. Un plan qui manque un peu de finesse pour des khosavis, et qui surtout va se révéler pour le moins compliqué dans sa mise en œuvre !
Le bal des prétentieux
À partir de là, c’est le concours de qui commettra la bourde la plus grosse en se croyant le plus malin ! Williams a peuplé son histoire de personnages tous plus bouffis d’orgueil les uns que les autres, et qui donc commettent impairs sur impairs, sans jamais se remettre en question. C’est un vrai délice ! La palme revenant sans doute aux hommes de main des impérialistes, deux olibrius khosavis aussi bêtes qu’arrogants, et à qui je dois bien la moitié de mes crises de rire lors de cette lecture. Mais il y en a bien d’autres, au milieu desquels seul surnage Drake. Normal…
Au final…
Le livre n’a pas rencontré son public à l’époque, et c’est bien dommage ! Deux suites existent qui n’ont pas été traduites et j’avoue que je les aurais volontiers enchaînées, quelques mystères planant encore à l’issue de cette histoire. Je recommande donc, si vous avez la chance de mettre la main dessus, surtout si vous appréciez déjà cet auteur. Ce n’est peut-être pas le meilleur opus de Williams, mais il y a de quoi passer un bon moment.
Fiche JKB
Titre original :
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