Lord Cochrane vs l’ordre des catacombes

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Le second livre d’une série par

Quand on a une recette qui fonctionne, pourquoi ne pas la reproposer ? Les aventures du “marin audacieux” contre l’horreur cosmique(*) m’avaient bien plu et j’en redemandais donc ! Sans pour autant m’attendre à un chef‑d’œuvre. Le cocktail alliant horreur et roman historique que Gilberto Villaroel nous offre à nouveau ici est donc toujours dans un ton assez léger, avec une narration faisant encore la part belle aux scènes d’action. Pour autant, même si je l’ai lu sans trop de peine, il souffre à mon humble avis de quelques faiblesses.

(*) “Lord Cochrane vs Cthulhu” : le premier étant l’audacieux marin et le second… bon, s’il faut que je vous explique qui est Cthulhu, je sens que je ne vais pas réussir à finir cette chronique…

Attention, la chronique qui suit fait référence aux événements du livre précédent. Spoilers légers possibles !

Rendons à César…

C’est un volume caché, et donc secret, de la “Guerre des Gaules” rédigé par Jules César lui-même, qui va constituer le cœur de ce nouveau récit. Et au cœur de cette intrigue, sans surprise, on retrouvera donc encore Cochrane, mais aussi le capitaine Eonet ainsi que les fameux frères Champollion, qui accompagnaient déjà notre héros dans le premier livre(*). Tous vont bien sûr se lancer sur la trace de ce manuscrit antique et resté jusqu’ici secret, car caché par Julius lui-même. Celui-ci ayant décidé a posteriori qu’il valait finalement mieux garder secrètes les terribles aventures qu’il avait traversées dans l’Armorique fraichement conquise. Car, voyez-vous, César, près de deux mille ans avant que Cochrane l’audacieux n’y débarque, avait déjà découvert l’île qui, au large des côtes bretonnes, abrite l’abominable Cthulhu !

(*) Soyons clairs : il s’agit surtout des seuls survivants de l’histoire précédente. Tous les autres, de la piétaille soldatesque, finissant déchiquetés.

Et devinez qui a bien pu mettre la main sur ce manuscrit ! Lord Cochrane, le fameux “marin audacieux” ? Non ! Champollion ! Le jeune ! Celui connu pour avoir déchiffré la Pierre de Rosette, mais qui avant cela avait déjà réussi à traduire une inscription antédiluvienne, mettant Cochrane sur la trace du repère de Cthulhu, l’île de R’lyeh, étonnamment localisée à quelques encablures du Fort Boyard ! Débarquant à la demande de ce dernier à Paris, Lord Cochrane va alors tout tenter pour rendre public ce manuscrit narrant les épouvantes rencontrées par Julius Caius. Problème : un mystérieux Ordre des Catacombes a également eu vent de l’existence de ce texte, et cherche lui aussi à s’en emparer, et ce pour des motifs nettement moins altruistes(*). D’ailleurs, ils portent même des capuches, c’est vous dire comme ils n’inspirent pas confiance !

(*) En fait, rendre public ce texte n’a rien d’une mission altruiste pour celui que ses ennemis appellent “El Diablo”. Cochrane espère juste faire valoir ainsi son retour en grâce parmi les riches et les influents du Royaume d’Angleterre ! Et surtout récupérer de la thune !

Visite : les catacombes avec Cochrane

Le plus dingue au début de ce livre, c’est qu’assez vite Champollion le jeune indique qu’il a décidé de cacher ce manuscrit(*) dans un endroit surprenant ou pas, vous décidez, pas loin des catacombes de Paris. L’occasion rêvée pour Villaroel de nous en faire la visite, dans un sens et dans l’autre, en nous abreuvant de tous les détails historiques de ces fameuses catacombes par la voix de Champollion le jeune, jamais avare d’une information après une autre. Bref, avec des ennemis qui eux-mêmes s’y cachent, l’auteur s’est en fait assuré qu’on allait bien les connaître, lesdites catacombes.

(*) Le papyrus le plus important de la création, écrit tout en latin par Caius-mon-grand-père-tua-un-éléphant lui-même. Dingue !

Cela dit, impossible de dire que ces visites répétées ne servent pas l’intrigue, n’y même que l’auteur a décidé de diluer son cocktail avec des descriptions inutiles : on y court, on y tombe, on s’y bat dans ces catacombes, toujours de l’action ! Et pour tout dire, il y a aussi bien d’autres centres d’intérêt de Paris qu’on découvrira avec Cochrane. Et d’ailleurs aussi bien d’autres lieux célèbres, aux alentours ou plus loin, qu’on visitera à toute berzingue, en calèche, à cheval et en bateau, voire en galère romaine. Car R’lyeh est toujours cachée sous les vagues qui battent les côtes de la Bretagne.

Visite : R’lyeh avec César

Si Villaroel finira par envoyer à nouveau tous ses personnages là-bas, et le lecteur avide de découvertes avec, c’est que le contenu du manuscrit de César jette une lumière nouvelle sur R’lyeh et ses mystères. On ne découvre d’ailleurs le contenu de ce manuscrit que petit à petit, au fur et à mesure que Cochrane parvient à le traduire et le lire. L’auteur maintient ainsi une certaine tension, nous offrant quelques chapitres où le futur imperator, loin de s’arrêter à la surface des choses(*), finit par pénétrer les affreux secrets enfouis sous les fondations mêmes de l’île servant de refuge au Grand Ancien… et à ses serviteurs !

(*) Pour rappel : Lord Cochrane n’avait pas poussé bien loin son exploration de l’île dans le premier roman.

Et je dois avouer que j’ai surtout pris plaisir à ces chapitres “antiques” dans lesquels on retrouve d’assez chouettes éléments du “Mythe de Cthulhu”. Et même si le latiniste distingué(*) qui subsiste en moi a trouvé peu crédible un tel épisode de la vie de César, j’ai trouvé dans ces passages, au final les meilleurs et les plus fantastiques, un contrepoint rafraichissant par rapport à ceux consacrés aux péripéties Cochrane, plutôt convenues.

(*) Enfin, “distingué”, c’est une formule. Mais sinon, oui. Je me suis même fadé la traduction de quelques lignes de la vie de Jules par Suétone.

Feuilletonnant…

Si vous avez envie vous lancer dans cette suite, armez-vous de patience ! Parce que même si ça pétarade dans tous les coins, même si chaque chapitre se termine sur une sorte de cliffhanger(*), l’histoire met un temps fou à avancer et à se dérouler. Pour une scène d’action, certes visuelle et très convaincante et dans laquelle on ne peut que se laisser embarquer, comptez de cinq à dix chapitres. Oui, courts, mais quand même ! Deux gars se tirent dessus, se ratent, rechargent, l’un des deux se met à courir : deux chapitres ! J’exagère, bien sûr, mais à peine. Alors certes, c’est un page-turner, ça va vite, mais quelques passages m’ont semblé s’étirer au-delà de la normale.

(*) “Et soudain, quelqu’un frappa à la porte ! Cochrane n’était à Paris que depuis 18h38, et Champollion devinait que déjà les ennuis commençaient !” Hop ! Chapitre suivant : “Ce n’était que l’aide de camp de Cochrane. Champollion se remit à respirer.”

Seconde recommandation : ayez peu d’attentes ! On est ici juste face à une œuvre de divertissement, certes remplie de références historiques et lovecraftiennes, mais on est loin du chef‑d’œuvre littéraire. Peu de chance que lecteur se retrouve perdu : phrases courtes, du type sujet-verbe-complément, le récit est des plus faciles à suivre. Même avertissement pour l’intrigue, un peu légère, et dont tous les rebondissements favorisent sans surprise Lord Cochrane. Villaroel, tout occupé à nous dépeindre son héros formidable, en oublie d’ailleurs de donner une quelconque épaisseur aux autres personnages de son histoire. Un point que j’ai trouvé particulièrement désagréable pour le dirigeant du fameux Ordre des Catacombes du titre, machiavélique au point de connaître le scénario aussi bien que l’auteur, mais qui se révèle au final bien creux, à la limite du cliché d’un chef de culte échappé d’un téléfilm ou d’un feuilleton français des années 70’s.

Au final…

Si vous êtes à la plage, ou en vacances, vous y trouverez sans doute votre compte : c’est un assez bon vide-cerveau, parfois émaillé de passages fantastiques rendant hommage à H.P Lovecraft. Mais, pour ma part, je le classerai quand même deux crans en-dessous de “Lord Cochrane vs Cthulhu”, et je lui ai trouvé trop de longueurs pour que ça me donne l’envie d’y revenir un jour.

Cela étant dit, n’en restez pas à mon avis : vous trouverez, sous ma fiche, un lien vers la critique de ce roman publiée chez “Le nocher des livres”, qui pour sa part semble avoir plutôt bien apprécié cet opus !


Fiche JKB

  • Genre : Roman historique/Aventures à la Bob Morane/“Oh, là-bas, une horreur cosmique !”
  • Wow Level : 4/10. Même avec César en guest-star, ça casse pas trois pattes à un canard !
  • Note personnelle : 5/10. Je connaissais déjà la recette…
  • ~570 pages. Qui se lisent vite : sujet, verbe, complément. Mais j’y ai mis du temps…
  • Probabilité de relecture : 23% en cas d’hygrométrie normale. En cas de pluie, ça changera, mais je ne peux pas encore me prononcer.

Titre original :

Lord Cochrane y la hermandad de las catacumbas

2018

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