Dominium Mundi T.1

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6 minutes

Un diptyque par François Baranger

Je ressors ici une vieille fiche, au format plus court et au ton plus léger, dont le brouillon date de 2022.

Je paraphrase le 4 de couv’ : dans une Europe d’un futur proche (à peu près deux siècles) la civilisation se relève d’une guerre à l’échelle cataclysmique, sous l’égide d’un Vatican qui dirige depuis quelques temps l’Empire Chrétien Moderne, une mosaïque de royaumes, duchés et autres types de territoires au parfum médiéval, tous profondément croyants(*). On y croise des chevaliers en exosquelettes, montant des percherons mécanique, se battant avec des armes à énergies et des prêtres utilisant la science au nom de Dieu sans la moindre vergogne.

(*) Pour la plupart, tout du moins le clergé : croyants au point d’être des fanatiques, soyons clairs !

La gloire de Dieu n’ayant pas de limite, le Vatican a même financé la 1ère expédition en direction d’Alpha du Centaure, enfin d’une planète orbitant autour ! Si ! Et sans trop de surprise, les “missionnaires” y ont trouvé de la vie ! (*) Si ! Et, moins probable, une civilisation ! Civilisation tout d’abord sympa, qui fait faire aux terriens le tour des curiosités : “Ici, une montagne. Et par là, vous voyez : une forêt. Là on a cette ville. Et là, une ville aussi, mais celle-là est plus importante à cause du temple. Le temple de notre dieu, notre seigneur, notre sauveur…” Et là, l’impossible : dans le temple, un tombeau. Et dans le tombeau, je vous le donne en mille ! le Christ ! Si ! Si, si…

(*) Ben oui ! Tu montes une expédition interstellaire que si tu as de bonnes raisons de t’attendre à trouver quelque chose au bout ! Ils ont quand même un peu étudié le truc…

Et ça ne se passe pas très bien : les missionnaires réclament à corps et à cris qu’on leur donne ledit tombeau pour le ramener sur Terre, et se voient bien sûr offrir une fin de non-recevoir. Loin de lâcher l’affaire, ils tentent donc le coup de force, et essayent d’investir le temple les armes à la main. Avant de se faire proprement massacrer, bien sûr, par les autochtones. Sur Terre, ça passe plutôt mal. Obligé de réagir, le Vatican décrète donc la sainte croisade, lance le recrutement d’une armée, et finance la fabrication d’un vaisseau spatial ! Il faut retourner là-bas, et cette fois il faut gagner !

Invraisemblable, mais trop séduisant !

Avec un postulat pareil, clairement, j’étais alléché, c’était… inattendu, et ça avait l’air de promettre… À la lecture, ce fut encore mieux que je ne m’y attendais. C’est un roman riche, et long, dont la narration donne alternativement les point de vue d’un noble (Tancrède), d’un enrôlé de force (Albéric) et du “chef spirituel” de la croisade (Pierre), tout en ne négligeant pas les nombreux seconds rôles. Le 1er tome ne relate que le voyage en direction d’Akya(*). Et vu la taille du vaisseau, le nombre de passagers (un million !) et l’excitation globale (“Le Christ ! Le Chriiiiiiist !”), c’est un voyage dont est exclu l’ennui : c’est trépidant ! Entre le flou qui entoure les détails de la croisade, les intrigues des seigneurs, ducs et prêtres qui dirigent cette expédition invraisemblable, on finit par se poser autant de questions que s’en posent les deux principaux protagonistes, Tancrède le noble bombardé lieutenant et Albéric l’enrôlé de force. Car ces deux-là, par le hasard et les positions qu’ils occupent dans l’organisation de cette croisade, vont bien évidemment se retrouver mêlés aux sombres agissements qu’abritent les non moins sombres couloirs du vaisseau…

(*) Akya ! Oui, les locaux ont pensé à nommer leur planète ! Sans même attendre des missionnaires qui l’auraient proprement baptisée ! Quel toupet quand même !

C’est pas le royaume du Danemark… (*)

…mais clairement, il y a quelque chose de pourri dans cette croisade ! Outre que la plupart des seigneurs et des membres du clergé, que ce soit sur le vaisseau ou sur Terre n’aient que peu de points communs avec des saints, par petites touches on finit par sentir que la croisade, ou la raison pour laquelle elle a été lancée, ne sont pas tout à fait ce qu’en croit le gros de la troupe. Ni même ce qu’on en croyait au début, et comme Tancrède et Albéric, on se pose des questions et on finit par tout mettre en doute… parce que quand même : le tombeau du Christ sur une autre planète ? WTF !?

(*) Hop, une petite référence, pour faire croire que j’ai lu Hamlet.

Passionnant, maîtrisé et intéressant

Évidemment passionnant rien qu’avec son postulat de départ, ce premier tome ne se lâche pas facilement. C’est remarquablement bien écrit, quasiment jamais ennuyeux et très souvent étonnant dans l’ajout d’un nouveau détail, d’une nouvelle sous-intrigue, d’un nouveau personnage. De plus, en proposant une relecture futuriste de la première croisade, François Baranger démontre une érudition à la hauteur de l’ambition de son projet. Et en matière de bonnes idées science-fictionnels, il atteint et dépasse même le niveau souhaité. Le tome 2 est d’ores-et-déjà lu. Sa critique finira par venir.

Au final…

Vous aimez les pavés ? Il vaut mieux : le premier tome compte pas loin de 600 pages, le second en comptera près de 800 ! Mais impossible de s’ennuyer en le lisant, et il est en plus d’une lecture très abordable (de la SF pour tout le monde quoi !), écrit avec une plume aussi légère que précise ! Si en plus vous êtes féru d’Histoire et de romans historiques, le matériau d’origine est là(*) : vous allez aimer ! Bref, je recommande !

(*) L’auteur s’est tout de même basé sur le poème épique “La Jérusalem délivrée” !

À noter : François Baranger est un remarquable illustrateur, et les couvertures des deux tomes sont de lui !


Fiche JKB

  • Genre : Space-Opéra militaire/Post-apocalyptique/Re-création historique
  • Wow Level : 8/10. Surtout pour le sujet, totalement maîtrisé.
  • Note personnelle : 7/10. J’ai lu mieux, mais pas souvent.
  • Long. Pourtant ça s’avale sans mal ; ai pas vu le temps passer… 600 pages ! Un vrai page-turner !
  • Probabilité de relecture : Forte. Pas de suite, mais je ne le bouderai pas dans 5 ans !

Titre original :

Dominium Mundi

2013

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